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Le Cri des Peuples

Un film post-apocalyptique’ : Moscou dénonce le génocide à Gaza et la complicité occidentale

lecridespeuples

11 Mai

Déclaration de Vassily Nebenzia, représentant permanent de la Fédération de Russie à l'ONU, lors de la réunion de l'Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU) concernant l'utilisation du droit de veto au Conseil de sécurité sur le Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, le 1er mai 2024.

Source : Mission permanente de la Russie à l'ONU

Traduction : lecridespeuples.fr (Substack)

Monsieur le Président, chers collègues,

Il y a presque deux semaines, le 18 avril, nous avons vu les États-Unis utiliser à nouveau leur droit de veto pour bloquer la candidature de la Palestine à l'adhésion aux Nations unies. Presque totalement isolés, les collègues américains ont déclaré avoir opposé leur veto au projet de résolution algérien parce qu'ils ne voulaient pas créer d'obstacles au processus de négociation qui aboutirait à la création de deux États sur la base du cadre juridique international existant. En d'autres termes, selon leur logique, si la Palestine obtenait le statut d'État membre à part entière des Nations unies, cela l'amènerait à refuser de négocier avec Israël. Nous sommes catégoriquement en désaccord avec cette logique. Approuver la demande palestinienne ne signifierait rien d'autre que corriger l'injustice historique à l'égard de la Palestine, qui aurait dû devenir un État et être admise à l'ONU dès 1948. Il s'agit là de notre devoir commun envers les Palestiniens, et non d'une « carotte » qui les inciterait à se montrer plus conciliants dans les négociations avec Israël.

Nous regrettons ces actions de nos collègues américains. Elles ne reflètent absolument pas la position de principe adoptée par les autres membres du Conseil de sécurité des Nations unies, qui sont essentiellement devenus les otages des États-Unis sur la question du Moyen-Orient au cours des six derniers mois.

D'une manière générale, nous devons affirmer que personne n'attend quoi que ce soit de nouveau des réunions de l'AGNU qui se tiennent après les vétos américains sur la Palestine. Les discussions au sein de l'Assemblée générale ont déjà pris un caractère routinier. Pour la cinquième fois depuis le début de l'escalade actuelle du conflit israélo-palestinien, nous avons, comme on pouvait s'y attendre, entendu de belles paroles de la part de nos collègues américains, qui se résument toujours au fait que les États-Unis s'engagent dans des efforts diplomatiques actifs sur le terrain. En d'autres termes, Washington préfère l'approche unilatérale à l'approche multilatérale et demande aux autres de ne pas « se mettre en travers » de leur chemin.

Mais essayons d'évaluer honnêtement et objectivement les résultats de cette approche unilatérale. Qu'a apporté la « diplomatie discrète » des États-Unis alors que 35 000 personnes ont été tuées à Gaza ?

A-t-elle réussi à inciter les parties à un cessez-le-feu ? La réponse est évidente : non. Au contraire, l'opération meurtrière d'Israël à Gaza se poursuit depuis près de sept mois, elle ne s'interrompt que lorsqu'elle est tactiquement opportune pour Israël, et les trois résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies sont totalement ignorées. Selon de récents rapports terrifiants, des charniers ont été découverts dans l'enclave. Une enquête internationale indépendante est nécessaire pour s'assurer que les auteurs de ces crimes répondent de leurs actes.

De nombreuses villes de la bande de Gaza ont été rasées, des hôpitaux et des écoles ont été détruits et des routes endommagées. L'UNMAS (Service de lutte contre les mines des Nations unies) estime que l'enlèvement des munitions non explosées à Gaza prendra 14 ans. Aucune perspective d'accord durable sur la cessation des hostilités n'est visible à ce stade. Il convient de noter que lorsque le Conseil de sécurité a adopté la résolution 2728 exigeant un cessez-le-feu immédiat pour la période du ramadan, les États-Unis se sont empressés de déclarer la nature prétendument non contraignante de cette résolution, ce qui n'a fait que jeter de l'huile sur le feu, donnant à Jérusalem-Ouest [la Russie reconnait Jérusalem-Ouest, et non Tel-Aviv, comme capitale d'Israël] les coudées franches non seulement dans l'enclave, mais aussi en Cisjordanie.

Nos collègues américains ont-ils réussi à mettre un terme aux activités illégales de colonisation en Cisjordanie ? Manifestement non. Depuis le 7 octobre 2023, les colons israéliens ont tué au moins 18 Palestiniens avec la complicité des forces israéliennes. Au cours de cette période, 1 200 Palestiniens ont été expulsés de leurs terres et leurs maisons ont été démolies. Dans ce contexte, les autorités israéliennes ont délivré un nombre record de 12 349 permis de construire illégalement des colonies pour l'année 2023. C'est presque trois fois plus qu'en 2022. Cela fait longtemps que nous n'avons pas entendu les représentants américains condamner l'expansion illégale de la puissance occupante en Cisjordanie. Nous ne l'avons pas entendu non plus aujourd'hui.

La question légitime suivante est de savoir si les otages [il est regrettable que la Russie parle d'otages pour désigner tous les captifs entre les mains du Hamas, alors qu'il y a de nombreux soldats parmi eux : ce sont des prisonniers de guerre] ont été libérés. Là encore, la réponse est non. Mais ce n'est pas surprenant, car l'opération en cours à Gaza (dont la plupart des victimes sont des civils palestiniens, principalement des femmes et des enfants) n'est pas propice à la résolution de cette question dans le cadre des négociations indirectes entre le Hamas et Israël. À la lumière des plans annoncés par Jérusalem-Ouest pour attaquer Rafah, il est évident qu'Israël n'est intéressé que par une solution militaire à la question palestinienne, même au prix de la vie des otages restants.

Malheureusement, nos collègues américains jouent le jeu. Le projet américain de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies (auquel la Russie et la Chine ont opposé leur veto en mars) faisait également partie des plans du tandem américano-israélien, car il stipulait en fait un consentement du Conseil de sécurité des Nations unies à de futures opérations à Gaza.

Les diplomates américains ont-ils pu aider à établir un accès humanitaire valable à Gaza ? Malheureusement, la réponse à cette question est également négative. Le Secrétariat de l'ONU déclare sans équivoque qu'une telle tâche ne peut être accomplie sans une cessation des hostilités. L'incident tragique survenu avec les travailleurs de la « World Central Kitchen » en a été la sinistre confirmation. Le problème de la distribution en toute sécurité du fret humanitaire dans l'enclave et de l'obtention sans entrave de permis de la partie israélienne pour le transport de l'aide humanitaire n'a pas non plus été résolu. Les alternatives proposées —livraisons par avion et par bateau— n'offrent pas de soulagement significatif. Même un observateur extérieur peut s'assurer que les livraisons par voie terrestre sont cruciales, après avoir regardé les images horribles qui sont devenues virales récemment. On y voit des pauvres gens dans le besoin être tués par des conteneurs qui leur tombent sur la tête ou se noyer en essayant de récupérer des paquets d'aide humanitaire largués dans l'eau. Chers collègues, il ne s'agit pas d'un film post-apocalyptique, mais malheureusement des réalités de la vie à Gaza en 2024.

Au lieu de persuader son allié de faire tout ce qui est en son pouvoir pour assurer l'acheminement complet de l'aide par voie terrestre, Washington investit des sommes considérables dans la construction d'un port temporaire à Gaza, qui n'a aucun sens pratique en temps de paix. Cet argent suffirait à couvrir un quart de l'appel humanitaire de l'UNRWA pour une année entière. Entre-temps, l'Agence, qui sauve la vie de l'enclave et des réfugiés palestiniens, a reçu une « note noire » de la part des États-Unis, qui avaient suspendu leur financement pour l'Agence en raison des accusations israéliennes, jusqu'ici non confirmées, contre 19 employés de l'UNRWA d'avoir participé à l'attaque du Hamas du 7 octobre.

Monsieur le Président,

Nous savons tous que le conflit israélo-palestinien, comme le conflit israélo-arabe dans son ensemble, n'a pas et ne peut pas avoir de solution militaire. La violence engendre la violence, et ce cercle vicieux ne peut être brisé que si nous parvenons à un cessez-le-feu inconditionnel et entamons une discussion sérieuse sur les possibilités d'un règlement politique juste.

Pour cela, les hostilités doivent cesser et certaines conditions doivent être créées. Nous sommes profondément convaincus que l'adhésion à part entière de la Palestine aux Nations unies est l'une d'entre elles. Cela mettrait sur un pied d'égalité les positions de négociation initiales des parties, dont l'une s'est vu accorder immédiatement cette adhésion en 1949. C'est l'admission de la Palestine aux Nations unies qui constituerait la première étape pratique vers une solution à deux États, attendue depuis longtemps, au problème du Moyen-Orient.

L'écrasante majorité des membres des Nations unies s'est exprimée haut et fort à ce sujet, y compris lors de la réunion d'aujourd'hui.

Je veux croire que Washington décidera enfin de ne pas s'opposer à la communauté mondiale, mais d'unir ses forces avec elle. Ce n'est pas une coïncidence si de grands rassemblements d'étudiants ont lieu ces jours-ci aux États-Unis. Les participants sont indignés par l'indulgence de leur gouvernement à l'égard des politiques agressives d'Israël et de la fourniture d'armes utilisées pour tuer des femmes et des enfants palestiniens.

Cela peut et doit cesser. La Russie continuera à faire tout ce qui est nécessaire pour que le massacre de Gaza cesse et que les futurs paramètres de la coexistence d'Israël avec une Palestine indépendante, membre à part entière de l'ONU, et d'autres voisins arabes soient décidés à la table des négociations, et non sur le champ de bataille.

Note du Cri des Peuples : La Palestine se libèrera par la force, avec l'aide de ses alliés de l'Axe de la Résistance : le 7 octobre et ses suites l'ont démontré sans appel. Comme l'a affirmé Hassan Nasrallah, « Ce qui s’est passé depuis le 7 octobre jusqu’à aujourd’hui, et ce qui se passera ultérieurement, a affaibli Israël, ébranlé toute l’entité, et fait trembler ses fondations et ses piliers. Et comme le disent nos frères palestiniens à raison, tout cela a placé Israël sur la voie de l’annihilation, et nous assisterons tous de nos propres yeux à la disparition de l’entité usurpatrice, avec la grâce de Dieu ! Et personne ne pourra la protéger. Personne ne pourra la défendre. »

Je vous remercie de votre attention.

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