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11 Septembre 1973 Santiago du Chili, 14 heures

4 septembre 1970 : Salvador Allende obtient la majorité à l’élection présidentielle.

24 octobre 1970 : il est élu président du Chili : coup de tonnerre à la Maison Blanche !

Le peuple chilien vient de se choisir un président socialiste, Salvador Allende, élu avec les voix des communistes et du centre gauche.

Nous sommes alors en pleine guerre froide, après l’affaire des missiles de Cuba. les États-Unis sont ébranlés par l’assassinat de John Kennedy, fin 1963, l’assassinat de Martin Luther King le 4 avril 1968 et celui de Robert Kennedy le 6 juin 1968, deux assassinats impliquant vraisemblablement la CIA; le Mouvement des Droits Civiques se développe considérablement, l’opposition à la guerre du Vietnam grandit.
À l’extérieur, 300 manifestants étudiants sont massacrés par la police à Mexico, quelques jours avant l’ouverture des JO de 1968, durant lesquels les athlètes américains Tommie Smith et John Carlos lèvent leur poing ganté de noir sur le podium… et Che Guevara est assassiné en Bolivie avec la complicité de la CIA.

Les États-Unis veulent impérativement éviter toute prise d’influence de L’URSS sur l’Amérique latine, qu’ils considèrent comme leur chasse gardée. Pour cette raison, ils s’impliquent directement dans les élections présidentielles chiliennes.

En 1958, pour sa deuxième candidature à l’élection présidentielle, Salvador Allende arrive second, grâce aux voix des communistes. En 1964, il se présente pour la 3e fois. Il doit affronter Eduardo Frei, candidat de la démocratie chrétienne, conservatrice, imprégnée de cléricalisme, qui sera élu grâce au report des voix de la droite, et avec l’appui des États-Unis, qui font campagne contre Allende.
Dans une interview, Richard Nixon, ex-président des États-Unis déclare : « La CIA a commencé dès 1963-1964 à lancer des fonds particulièrement importants au Chili, pas tellement pour corrompre certains membres du gouvernement chilien, mais pour appuyer certains candidats qui étaient sur des listes anticommunistes ; 4 millions de dollars ont été investis par l’administration Johnson dans deux élections, qu’Allende a perdues. »

En 1970, candidat pour la quatrième fois, il affronte Jorge Alessandri, ex-président de la Confédération patronale chilienne et ex-président du Chili, candidat du parti national, soutenu par les États-Unis qui aident au financement de sa campagne.

Malgré cela,les Chiliens ont choisi. Edward Korry, ambassadeur des États-Unis au Chili écrit: « Lorsque j’écris ces lignes, 300000 bulletins n’ont pas encore été dépouillés, mais la puanteur de la défaite est évidente » ; et le lendemain : « Mon pessimisme électoral de la nuit dernière s’est renforcé […]. Nous ne pouvons compter pour l’instant sur les forces armées… »
Le 15 septembre Nixon, président des États-Unis, déclare à Richard Helms, patron de la CIA : « II y a peut-être une chance sur 10 mais sauvez le Chili. Aucune importance en cequi concerne les sommes dépensées. 10 millions de $ sont disponibles, plus si nécessaire ! »
Deux plans sont alors élaborés: *
-le premier consiste à contraindre Frei, président en exercice, à dissoudre l’Assemblée avant l’élection et rappeler les Chiliens aux urnes. Échec.
-Le second plan est l’enlèvement du général Schneider, légaliste, qui est assassiné le 22 octobre; mais l’effet est inverse ; l’armée se range derrière le scrutin populaire.
Malgré la violence des partis de droite, malgré l’intervention très directe des gouvernements des États-Unis (de John Kennedy à Richard Nixon), le 24 octobre 1970, Salvador Allende est élu par le Congrès Président du Chili.
À partir de là, les États-Unis utiliseront tous les moyens pour déstabiliser ce gouvernement élu démocratiquement par le peuple chilien, mais dont la victoire est fragile, car Allende n’a
obtenu que 36 % des voix et doit sa nomination au soutien des députés de la Démocratie chrétienne.
Dès son arrivée au pouvoir, Allende met en place un gouvernement d’Unité Populaire, constituée des socialistes, communistes, centre gauche et extrême gauche, et engage des réformes de grande ampleur.
Il met en place une importante réforme agraire qui rend la terre aux paysans qui la travaillent : toutes les propriétés de plus de 80 hectares sont nationalisées; le salaire minimum est fortement augmenté; une distribution de lait à tous les enfants est mise en place. Il déclare : « Je veux que dans le système de santé que nous allons créer, les travailleurs et leurs familles soient assistés médicalement. Le meilleur investissement que peut faire un peuple c’est de nourrir et éduquer ses enfants. »

Devant l’ampleur de ces mesures sociales, les riches s’inquiètent; ils se précipitent pour placer leur argent dans un état voisin, l’Argentine, dirigée alors par Juan Perón. Le Chili est le 3e producteur de cuivre - un cuivre d’excellente qualité -, après les États-Unis et l’URSS. Les multinationales américaines pillent le sous-sol chilien, riche de ce minerai de cuivre et en tirent des profits gigantesques.
Le 11 juillet 1971| ,le Parlement vote la loi de nationalisation.

Au printemps 1971, le plan d’asphyxie de l’économie chilienne, mis en place par la CIA avec le concours d’ITT, commence à porter ses fruits. La pénurie devient générale, le ravitaillement fait défaut, on manque de médicaments et de pièces de rechange, suite à
l’embargo américain. Les entreprises américaines n’investissent plus, la Banque mondiale coupe les fonds. Seules les aides militaires se poursuivent; il s’agit d’asphyxier l’économie et de favoriser l’armée. Le jour où Allende reçoit Fidel Castro, des centaines de femmes descendent dans les rues de Santiago. Les ménagères des grands bourgeois manifestent contre le rationnement et la vie chère et font résonner leurs casseroles vides. Cette manifestation est soutenue par l’extrême droite et secrètement financée par la CIA. La presse lance une rumeur de trafic d’armes à partir de Cuba par des proches du Président.
Le 11 avril1972, une grande manifestation est organisée à Santiago, encadrée de près par les milices de Patria et Liberta, le parti d’extrême droite. On comptera 200 000 manifestants contre le pouvoir en place. Quelques jours plus tard, les militants de l’Unité Populaire répliquent, mobilisant le double de manifestants mais cette manifestation met en évidence la division de la gauche. Le MIR (1) et les mouvements de la gauche
révolutionnaire lâchent Allende lui reprochant son esprit réformiste.

Du 10 octobre au 6 novembre 1972, une grève générale des camionneurs paralyse le pays et bloque les approvisionnements. Ce mouvement de la grève des camionneurs qui paralyse le pays en octobre 1972 est soutenu financièrement par la CIA. Réagissant aux nationalisations effectuées par le gouvernement d’Allende plusieurs firmes américaines dont ITT, mais aussi Anaconda Copper et Kennecott, multinationales de l’industrie minière,
apportent leur concours à cette stratégie. La bourgeoisie se mobilise contre ce gouvernement aux mesures sociales. Lors des élections législatives de mars 1973,l’opposition remporte la majorité des sièges au parlement. Après la grève des mineurs de la mine El Teniente, l’état d’urgence est proclamé le 27 juin en raison du climat de violence dans le pays. Le 29 juin, une tentative de coup d’État se solde par un échec, dû à la fidélité du général Prats, aidé de Pinochet. Le 27 juillet commence une nouvelle
grève des camionneurs - grève patronale -, subventionnée par la CIA, qui inonde le pays de dollars pour soutenir cette grève qui paralyse le pays. Les forces hostiles à Allende se mobilisent.

L’armée et la gendarmerie sévissent contre les syndicalistes et les bastions ouvriers. Dans cette ambiance chaotique, le général Prats démissionne et est remplacé par Augusto Pinochet comme commandant en chef des armées. Une semaine avant le coup d’État, il n’y avait plus d’huile ni de lait ni de pain. Pour sortir de cette impasse politique, Salvador Allende prépare un référendum sur une réforme constitutionnelle. Pinochet lui conseille
d’attendre le 11 septembre et…

Le 10 septembre, les troupes d’infanterie de marine passent la journée avec quatre navires de la Navy au large de Valparaiso dans le cadre de manœuvres communes,
l’opération « Unitas ». De retour à Valparaiso, elles coupent les communications et la ville est aux mains des putschistes.

À 9 heures, Allende reçoit un communiqué lui annonçant le coup d’État. Il rejoint la Moneda (2) et prononce son dernier discours, comme il le dit lui-même. Les putschistes lui laissent trois minutes pour quitter la Moneda et se rendre. Le refus est catégorique. Á 11 heures, l’aviation chilienne bombarde le palais présidentiel et, à 14 heures la mort d’Allende et de plusieurs de ses fidèles est officielle.

Il s’agissait bien de liquider Allende, comme en témoignent ces échanges entre Pinochet et l’amiral Patricio Carvajal: « Allende est à la Moneda, alors il faut être prêt à lui tomber dessus; il vaut mieux tuer la chienne avant qu’elle n’ait des petits » et « on maintient l’offre pour le sortir du pays et on fait tomber l’avion en vol ».

Alors s’ouvre une longue période de terreur avec des milliers d’exécutions sommaires, d’enlèvements, de disparitions, et pour beaucoup de Chiliens la torture ou l’exil, sans compter les centaines d’enfants d’opposants supposés livrés à des couples stériles favorables au régime.
C’est à l’initiative des États-Unis, avec la complicité des multinationales américaines et du Syndicat des routiers, sous le regard indifférent, voire complaisant des démocraties occidentales et du Vatican, que le général Augusto Pinochet commettait cet attentat contre la démocratie. La duplicité du gouvernement anglais lui permit ensuite, sous couvert de
considérations médicales fallacieuses, d’échapper au jugement de son peuple et de la communauté internationale.

Jacky TEXIER mars 2019 -

 

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11 septembre : il y a 48 ans …

Bonjour,

Le 11 septembre 2001, les Etats-Unis subissaient le plus terrible attentat de leur histoire : 3000 morts dans l’attaque contre le World Trade Center. Cet attentat horrible sera largement commenté par les médias dans les jours à venir.

Le 11 septembre 1973, les Etats-Unis perpétraient un des pires attentats contre la démocratie : l’organisation du coup d’état au Chili et la prise du pouvoir par le général Pinochet qui allait avoir pour conséquence la persécution et l’extermination de tous les chiliens qui de près ou de loin pouvaient être soupçonnés de sympathie communiste, socialiste, ou d’opposition à la dictature militaire. Il s’ensuivit des dizaines de milliers de morts, d’assassinats, de disparitions, de tortures, de persécutions, ou d’exil forcé.

Sans occulter le drame du 11 septembre 2001, il est indispensable de remettre en lumière le jeu pervers de tous ces chantres de la liberté et de la démocratie qui ont permis ou ignoré ce coup d’État avec pour conséquence l’extermination de milliers de Chiliens.